Une séparation

D'habitude, les films iraniens ne sont vus que pas une poignée de cinéphiles pointus, ravis de s'en vanter lors des apéros entre amis, verre de Chardonnay à la main. Et là, le choc. Une séparation, de Asghar Farhadi, vient de passer la barre des 800 000 entrées en France. C'est LA surprise cinéma de l'été ; même la trop médiatisée Conquête de Nicolas Sarkazoy a fait moins bien. Mais pourquoi la séparation d'un couple à Téhéran attire-t-elle autant de monde ? D'abord, l'histoire est universelle. Un homme et une femme qui divorcent, ça parle à beaucoup de gens, forcément... Et puis, le réalisateur pimente le récit en y ajoutant une aide-soignante enceinte, un dépressif, et une fausse couche. Triste mélo. On croirait Santa Barbara au Moyen-Orient, en tellement plus subtil. Les personnages sont tous extrêmement nuancés, Asghar Farhadi montre qu'il n'y pas que les méchants qui mentent et le cinéaste se pose une question, là encore universelle : toutes les vérités sont-elles bonnes à dire ? Il est d'ailleurs intéressant de voir que les personnages sont plus aptes à mentir à l'homme qu'à Dieu ! Le succès du film tient également à la mise en scène. Non, le cinéma du Moyen-Orient n'est pas toujours ennuyeux, avec des plans interminables sur des routes désertes balayées par le vent. Caméra à l'épaule et montage rythmé, le réalisateur fait évoluer ses protagonistes dans la vie trépidente de Téhéran, au coeur de la classe moyenne iranienne, pas si éloignée de l'Occident finalement. Du début (plan séquence sur le couple chez le juge) jusqu'à la fin (l'homme et la femme séparés par une cloison vitrée), l'image est constuite et soignée. Allez, je prends le risque de passer pour un intello chiant... Oui, je vous conseille d'aller voir Une séparation. Preuve qu'à Téhéran, on peut faire des films aussi divertissants qu'à Hollywood !

EN BREF : un drame iranien poignant