Crime d'amour
Monsieur Corneau,
je viens d'apprendre avec tristesse votre décès, "des suites d'une longue maladie" selon la formule consacrée. Avant que vous ne montiez définitivement au ciel, je voulais vous faire part de mes impressions concernant votre dernier film, Crime d'amour. Même dans l'au-delà, vous n'échapperez pas à la critique ; le monde du cinéma est si dur.
Une fois de plus, vous avez choisi le polar comme mode d'expression. Au coeur de votre histoire : la confrontation entre une chef d'entreprise sans scrupules et une jeune business woman débutante. Kristin Scott Thomas VS Ludivine Sagnier. Que les esprits salaces se calment, il ne s'agit pas d'un combat dans la boue, mais d'une guerre psychologique entre deux femmes prêtes à tout pour réussir.
J'ai apprécié le côté épuré de votre réalisation. Aucune scène d'action, beaucoup de gros plans sur les visages. Le noir et le blanc s'opposent constamment, comme si le monde des multinationales ne savait accepter les nuances. Crime d'amour est construit comme un jeu d'échec mortel, duquel on ne peut ressortir indemne et innocent.
Le problème, c'est que votre film est inégal. Vous ne tenez pas la distance (je me permets d'être un peu dur avec vous, vous ne risquez pas d'être vexé là où vous êtes désormais). Si la première partie est exceptionnelle de tension, la deuxième moitié du film pêche par trop de convenances. Aviez-vous vraiment besoin d'inclure des scènes de flashback en noir&blanc ? Le procédé est usé et indigne de vous.
Mais surtout, ce que je vous reproche, c'est d'avoir engagé Ludivine Sagnier. Malgré son talent et son expérience, la belle blonde est trop lisse pour incarner un rôle aussi complexe. Ça minaude, ça surjoue, ça se trémousse. Au final, la princesse Ludivine est éclipsée par la reine Kristin, qui livre ici une performance rare, tout en beauté et en perfidie. Visiblement, vos deux comédiennes ne vous ont pas inspiré de la même manière.
Même si vous nous quittez sur ce film imparfait, sachez, Monsieur Corneau, que vous allez manquer au cinéma français. Je n'oublie pas que l'on vous doit Le Cousin, bien installé au coeur de ma dvdthèque. Très sincèrement, je vous salue.
EN BREF : un polar avec un début chiadé et une fin bâclée
Commenter cet article