The Danish girl ✔✔✔
DRAME / De Tom Hooper (GB/USA). Avec Eddie Redmayne et Alicia Vikander.
LE PITCH / Einar a un problème. Il a emprunté à sa petite amie ses habits, et il adore ça. Les mules, les robes, les perruques... Bienvenue dans la version transgenre de Nouveau look pour une nouvelle vie. Sauf que ce relooking, ma chéééérie, cache un mal-être très profond. Einar en a assez de ce pénis qui dépasse, il veut un vagin. Malheureusement pour lui, on est au début du XXème siècle, le père Kardashian n'a pas encore fait la une de Vanity Fair, Indochine n'a pas encore chanté « un garçon au féminin » et le changement de sexe n'est que de la science-fiction.
Encore un film que Christine Boutin va télécharger illégalement sur le Net, en même temps que Le secret de Brokeback Moutain et La cage aux folles. Adeptes de la manif connerie pour tous et de la théorie du genre s'abstenir. Tom Hooper s'attaque à un sujet qui dérange : la transexualité. Le réalisateur transcende les clichés, en transperçant l'intimité d'un peintre non transalpin en besoin de transformation, transi de passion pour les robes et prenant la pose sur des transats. J'ai essayé par tous les moyens de caser « transhumance » mais je n'y suis pas arrivé ; j'en transpire encore.
Pas de stéréotype, de la subtilité. Voilà tout l'intérêt de ce film. L'héroïne n'a rien à voir avec Priscilla, l'extravertie du désert australien. Tom Hooper déconstruit toutes les idées reçues : le transexuel n'est pas un homme qui s'habille en femme pour s'amuser ni un homme qui aime les hommes, encore moins un pervers ou un schizophrène. Le parcours de Einar/Lili est très instructif. On comprend la souffrance d'être né dans la mauvaise enveloppe corporelle et le courage de vouloir modifier l'ordre des choses par une opération douloureuse. Votre regard sur la transexualité et les transgenres va changer grâce à ce film.
Pour la petite info Wikipédia, Einar Wegener alias Lili Elbe, le personnage central, a réellement existé. Cet(te) artiste danois(e) est considéré(e) comme la première personne à avoir subi une chirurgie de ré-attribution sexuelle. C'était en 1930. Et son histoire est aujourd'hui un modèle pour tous les transgenres.
Au-delà de la thématique, The Danish girl est une oeuvre d'art, au sens propre. Le grain de l'image est superbe, chaque plan est construit comme un tableau de maître. Lignes de fuite, flous-nets, paysages expressionnistes. On en oublierait presque qu'on est au cinéma. A un moment, j'ai même eu l'impression d'être au Louvre dans une expo dédiée à l'école danoise du début du XXème siècle ; comme il n'y avait pas de pyramide en verre dans l'entrée, mais une pyramide de pop corn trop odorant, j'ai vite compris où j'étais.
Puisque je parle de peinture, quel modèle ce Eddie Redmayne ! Il prend la pose avec talent. Son look androgyne ne fait pas tout. Il est extrêmement convaincant dans son phrasé et sa gestuelle. Son expression faciale (notamment labiale) lui donne même une petite ressemblance, par instants, avec Emmanuelle Béart. Cette performance, ajoutée au fait qu'il ne soit pas black, lui vaut une nomination pour l'Oscar du meilleur acteur.
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