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22 Aug

Des lendemains qui chantent ✔✔✔

Publié par Romain Duchez  - Catégories :  #Critiques 2014

Docu-fiction politique de Nicolas Castro (France)

Le film aurait pu s'intituler "Des lendemains qui déchantent". Tant les déceptions vécues par les personnages sont grandes. 1981 : le visage de François Mitterrand apparaît sur les écrans, la gauche s'empare du pouvoir en France, un immense espoir naît dans les classes populaires. 2002 : les mêmes qui sablaient le Champagne, 20 ans plus tôt, hésitent entre Besancenot, Taubira, Laguiller, Mamère, Chevènement... et Jospin. Finalement, c'est Jean-Marie qui sera au second tour. Les scandales sont passés par là. Les promesses non tenues, aussi. Les privatisations, les délocalisations, les licenciements.

Le réalisateur compose un kaleïdoscope de la gauche française. Le jeune journaliste fougueux abonné à Libé, le trotskiste pourri par le fric et le pouvoir, la belle énarque ambitieuse et rebelle, le fils d'immigré autodidacte, le vieux syndicaliste. Des personnalités différentes, mais qui se retrouvent sur un point : la désillusion. On reprochera juste un léger manichéisme ; on a l'impression par moment que les riches sont forcément méchants et les pauvres forcément gentils.

Nicolas Castro, avec ce premier film, semble dire tout haut ce que les militants de base du parti socialiste pensent tout bas. Il règle ses comptes avec la gauche caviar opportuniste incarnée ici par Bernard-Henri Lévy et Bernard Tapie. Grosse charge contre Libération et Serge July, symbole des soixante-huitards embourgeoisés et inféodés au pouvoir mitterrandien. Le film dénonce les dérives de la gauche, comme pour expliquer le manque de crédibilité du PS aujourd'hui.

© Thibault & Anouchka - Karé production - Delante Films

© Thibault & Anouchka - Karé production - Delante Films

L'œuvre prend également des airs de fiction documentaire, grâce à l'utilisation d'archives télé particulièrement bien choisies. Mitterrand qui arrête une interview pour ne pas répondre à des questions gênantes, Lang qui avoue être amateur de seins en forme de poire, Le Pen et Tapie qui débattent comme des poissonniers. Idéal pour parfaire sa culture politique.

En tant que journaliste, je suis sensible au débat que provoque ce film sur la liberté des journalistes politiques. Quelles questions peuvent-ils poser? Où commence la censure? Où s'arrête l'auto-censure? Des interrogations essentielles, à l'heure où les politiciens squattent les chaînes info du matin au soir.

Et puis ce film est porté par un casting convaincant. Pio Marmaï et André Dussolier, toujours aussi justes. Gaspard Proust que l'on se plait à détester. La (très) belle Laetitia Casta confirme ses talents de comédienne, nous faisant oublier qu'elle fut mannequin dans une autre vie. Enfin, petit coup de cœur pour Anne Brochet, hilarante en patronne de presse incapable de prononcer une phrase sans un mot anglais.

Non seulement je vous recommande à vous, lecteurs de ces quelques lignes, d'aller voir ce film. Mais je le recommande aussi à un certain François H. Enfin, si bien sûr il a temps, avant d'aller à la boulangerie chercher des croissants.

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