La vie d'une autre

C'est un vrai cauchemar que vit Juliette Binoche dans ce film. Le soir, étudiante, elle se couche dans les bras de son amoureux. Le matin, femme d'affaires, elle se lève en pleine procédure de divorce. Entre les deux, quinze ans ont passé ; fumer est devenu interdit dans les lieux publics et les Américains ont élu leur premier président noir. Avec un tel pitch de départ, Jean-Marie Poiré aurait pu faire une comédie potache truffée de "Okayyy" et autres "Monsieur Ouille, pas avec votre pancho!". Sylvie Testud, elle, préfère traiter le sujet avec sensibilité. Certes, la réalisatrice débutante s'accorde quelques scènes comiques, mais la cocasserie de la situation l'amène surtout à s'interroger sur la manière dont chacun mène sa vie. Dans quelle mesure est-on maître de son destin ? Est-il possible de rattraper des années perdues ? Peut-on aller contre le cours des choses ? Autant de questionnements qui pourraient faire l'objet d'une dissert' de philo. Juliette Binoche trouve le ton juste pour interpréter ce personnage, tantôt candide tantôt courageuse face à la situation. Son monologue final, où elle tente d'exprimer son mal-être, est particulièrement émouvant. Derrière la caméra, Sylvie Testud ne révolutionne pas la mise en scène et s'appuie sur le charisme de son actrice principale. On passera sur le début du film, où Juliette Binoche se sert de ses cheveux longs pour jouer les étudiantes... Et puis, on s'amusera de voir la femme d'affaires capable de gérer une multinationale sans même connaître le moindre dossier... Malgré ces quelques invraissemblances, La vie d'une autre n'en demeure pas moins un film poignant.

EN BREF : vis ma vie 15 ans après